---

Nerea semble à première vue la courtisane par excellence...Dans le mauvais sens du terme.
Les premiers qualificatifs qui viennent quand on l'observe sont frivole et superficielle. Elle semble n'être intéressée que par les plaisirs du monde de la nuit comme des vivants. Autrement dit, son intérêt va aux hommes, aux bijoux, à l'art même si elle ne dédaigne pas les sujets plus profonds et sérieux. Elle surprends dans ces moments là par son esprit acéré, car la demoiselle est très loin d'être sotte ou inculte. Néanmoins, elle ne semble pas l'utiliser autrement qu'un fard de plus pour sublimer sa personne.
Les rares qui la connaissent bien, et notamment son Sire qu'elle idolâtre comme un véritable dieu, savent que tout cela est bien loin de la réalité.
Son esprit vif et retors au besoin est son arme principale. Et si elle affecte le masque de la courtisane frivole et inoffensive dans sa course à étourdissement des sens, ce n'est que pour mieux approcher les proies potentielles, en douceur.
La véritable Nerea est une araignée qui tisse patiemment sa toile sans avoir l'air d'y toucher. Et gare à qui s'y retrouve prisonnier, car il n'y a pas la moindre once de pitié ou de commisération dans le cœur de la vampire. D'ailleurs ce dernier ne contient qu'une chose: les ordres et désirs de son Sire.
Pour autant celui-ci est un dieu incarné à ses yeux, elle ne cherche pas à évincer ceux qui gravitent autour de sa personne. Le servir de son mieux est son seul désir et bonheur.

---

Mère Nature a, lorsqu'elle s'est penchée sur le berceau de Nerea, été généreuse avec l'enfant qu'elle contemplait et plus le temps passait, plus la beauté de la jeune femme s'épanouissait comme celle d'un lys. L''immortalité a juste apporté à ce corps tentant et voluptueux cette étincelle qui la distingue du commun des Vampires. Une luxuriante chevelure vient caresser ses reins en une cascade de boucles soyeuses, faisant soupirer de frustration les hommes qui rêvent d'être une de ses mèches pour ne fusse qu'effleurer ce corps tentateur. Cet écrin d'or pur encadre avec douceur un visage opalin et sert de tenture de velours au jade de ses yeux, faussement limpides. Malgré la pâleur que lui a conféré le sang vampirique, sa douce peau garde encore quelques accents mats, héritage du métissage complexe de la péninsule ibérique qui coule dans ses veines. Ses traits délicats et doux, donnent à son visage une fausse impression d'ingénuité que ses lèvres semblables à un fruit gourmand, sensuel, démentent quand elles se retroussent en un sourire moqueur. Ses courbes voluptueuses et gracieuses appellent à la caresse et au plaisir lorsqu'elles ondulent devant vos yeux.

Nerea possède une démarche légère et quelque peu féline. Ses gestes sont aériens et bien que savamment calculés, ils viennent tour à tour parfaire ses mimiques faussement naturelles. Elle est d'ailleurs d'une grande expressivité, laissant facilement déborder des émotions qu'elle ne ressent aucunement, seulement destinées à tromper et a mieux manipuler qui se laisserait abuser.
De sa captivité première dans le sérail contenant les humains du clan vampire d'origine, elle garde le goût des bijoux et belles étoffes mais qu'elle utilise à bon escient plutôt qu'à profusion. Elle préfèrera toujours attirer le regard par une seule gemme scintillant sur sa gorge que de part une parure rutilante de pierreries.

---

Elle avait présenté la coupe à l'Ancien avec tous les honneurs dû à son rang. Le maître l'avait affecté au service de son éminent visiteur, elle, qu'il aimait à appeler le joyau du sérail. Il fallait dire qu’effectivement, années après années, la petite fille à la chevelure dorée avait tenu ses promesses, diamant brut poli jour après jour pour satisfaire l’œil des vampires en plus de leur palais.
La fête battait son plein, les convives qui avaient eu l'honneur d'assister au banquet donné en l'honneur de l'imminent Alessandro Volturri se partageant entre plaisir de la « table », danse ou devisant simplement en gardant un œil sur les corps sensuels qui ondoyaient au rythme de la musique. Le Maître avait décidé de choyer son invité en lui offrant tous les raffinements orientaux que les Maures avaient emmenés en ces terres. Et bien plus encore.

Elle n'avait pas besoin de le voir pour savoir que sous sa feinte nonchalance, ce dernier jubilait. A dire vrai, elle avait surtout veillé à garder ses yeux au sols , comme elle le devait mais surtout de crainte qu'il devine qu’elle savait. Et qu'elle s’apprêtait à surement commettre l'irréparable, mais peu importait pour peu qu'elle l'entraîne dans sa chute. Elle réclamait le prix du sang. Le prix de ce sang qu'elle offrait au Sire, feignant de ne pas sentir la brulure qu'il laissait sur son âme. Le sang de Nayeve... Son double prétendue morte, enfermée et livrée aux perversions cruelle de leur Maître.
Nerea pour le clan, Nayeve pour lui. Elle seule savait. Elle seule la nourrissait. Car au delà de protéger son secret, il s'assurait ainsi obéissance et la loyauté absolu de son joyau.
A ceci près que Nayeve lui avait tout dis. Elle avait repris ses esprits un peu trop tôt et avait perçu les projets de leur Maître envers ce grand vampire dont le seul nom provoquait une ire telle que la pauvre jeune femme avait faillis périr pour le soulager.
Le sang mort. Seul poison craint des vampires.
Le sang de sa sœur qui n'avais pas eu son repas ce soir. Et qui, elle l'avait sentit comme un coup de rasoir tranchant sur le fil invisible qui les liait, n'en aurait plus jamais besoin.
Oui, le Maître avait tout prévu.
Nayeve trop abimée par ses jeux, une fois son invité disparu il se servirait surement de son cadavre pour faire croire que l'empoisonneuse qui avait servi le Volturri était châtiée. Quant à elle...Elle prendrait la place de sa chère sœur.

Mais pour autant qu'elle aspirait a se venger avant de disparaître, elle n'avait toujours pas trouvé le moyen de prévenir le Sire. Il était le seul qui effrayait le Maître. Et a présent qu'elle se tenait a ses cotés, elle comprenait intuitivement pourquoi. Elle ne l'avait qu'entraperçu brièvement mais l'Immortel l'avait subjugué. Plus que ses traits, plus que sa grâce c'était son aura de puissance qu’elle avait ressentit de plein fouet, telle une antique divinité qui avait fait la grâce d'apparaitre aux communs qu'ils étaient tous devant lui.
Oui... Il était le seul espoir de voir le sang lavé.
A l'instant où il pris la coupe de ses doigts, elle releva légèrement la tête, plantant son regard dans le sien une demi seconde. Un regard appuyé, incisif.
Un simple regard pour lui dire, non ne buvez pas, on veut vous détruire. Étais-ce suffisant ? Avait-il compris ? Le sort en était jeté, c'était tout ce qu'elle pouvait faire. C'était déjà trop pour une esclave comme elle.

Son cœur se serra quand elle perçu qu'il levait la coupe vers ses lèvres. Elle avait échoué. Le maître gagnerait... Malgré ses traitrises, malgré sa nature abjecte... Il n'y aurait pas de châtiment. La main glacée du désespoir vint étreindre impitoyablement son cœur.

« Reste près de moi »
Cette pensée vint soudain s'inscrire en lettre de feu dans son esprit. Un ordre aussi simple qu'indiscutable. Elle continua d'observer le trajet de la coupe vers les lèvres de l'Ancien et perçu un changement subtil, dissimulé derrière le métal de l'objet, le sourire du Vampire changea et devint moqueur. Comment aurait-elle pu savoir que Alessandro en cet instant avait violé l'esprit du chef de Clan et s'amusait de le voir jubiler de sa victoire ? Les yeux de l'humaine s'agrandirent lorsqu'elle vit la coupe reprendre son trajet en sens inverse jusqu'à ce que que son pied touche le bois d'une table basse. Elle ne fut pas la seule surprise mais si son étonnement se mêlait de joie celui du dirigeant du Clan se teintait de peur, il avait compris que le Volturri avait déjoué son plan,qu'il savait et qu'il allait mourir. Mais hors de question de se rendre sans combattre, aussi il se leva précipitamment, alors qu'Alessandro restait nonchalamment dans sa position semi couchée tout en fixant le traître de son regard ambré qui reflétait une sentence de mort.

« Me prendrais-tu pour un des tes Infants débilitants pour penser que si grossière ruse viendrait à bout de moi ? »

Les mots de l'Ancien claquèrent durs, impitoyable alors qu'il daignait enfin se lever et sous les yeux ébahis de l'humaine le combat débuta à l'initiative du bourreau de sa sœur qui d'un geste fit voler les tisons des brûlots sur le Volturri qui bloqua les projectiles sans bouger. La suite fut trop rapide pour ses yeux de Mortelle et ce n'est qu'en voyant le dirigeant du clan étendu à terre au pieds d'Alessandro, baignant dans son sang, inconscient mais vivant qu'elle comprit que le combat était terminé.

« Réunis le Clan dans le Grande Salle. » ordonna l'Ancien à un Vampire présent

Celui-ci fila à toute jambe pour exécuter l'ordre et seulement alors le Vampire se tourna vers Nerea et lui fit signe de le suivre, ce qu'elle fit. L'Ancien chargea le traître sur son épaule et sans un mot, sans un regard ils prirent les couloirs tortueux qui menaient à la Salle de Réunion du clan jusqu'à arriver au balcon qui servait d'habitude aux harangues du Chef de Clan. D'un regard il signifia à la Mortelle de se tenir derrière lui puis il porta ses yeux sur les Vampires qui se massaient apeurés à ses pieds.

« Vampires, ou devrai-je dire larves infâmes, vous avez ce soir essayé de me tuer, mais surtout vous avez porté sur notre race la honte la plus ignoble qui soit. Vous vous êtes mis au même niveau que les Loups, non des Démons. Votre attitude est si avilissante pour notre race que je devrai détruire ce Clan dans son ensemble pour effacer cette tâche sur notre honneur. »

Nerea réfugiée dans un coin derrière le Vampire pouvait voir et sentir la peur émaner de la foule qui s'étendait à leur pied.

« Mais je ne suis pas l'un de ces dirigeants tyranniques qui exécutent le général pour la faute du particulier. Néanmoins je veux m'assurer que vous reteniez la leçon et que plus jamais cela ne se reproduise. »

La Mortelle vit alors le corps inanimé du tortionnaire de sa sœur quitter le sol et venir flotter au dessus de la foule et avant qu'elle ne réalise pleinement que cette étrangeté était du au seul fait du Vampire qui se tenait devant elle, elle entendit un hurlement informe sortir du corps et sous ses yeux horrifiés, elle vit le corps du traître se tordre de façon inhumaine, elle entendit comme tout le Clan, les os craquer, elle les vit sortir du corps comme autant de poignard. Ce ne fut que Quand Alessandro serra son poing qu'elle comprit que c'était lui et lui seul qui torturait le Vampire par la seule force de sa pensée. Un hurlement plus aigu et les quatre membres de l'ancien dirigeant se tendirent et dans un bruit insoutenable se séparèrent de son corps pour retomber sur la masse apeurée qui assistait à la leçon. Le tronc du traître s'agitait de soubresauts victime de son Immortalité qui m'empêchait de mourir. Un geste du poing et le corps et les membres partirent rejoindre le feu qui emplissait la grande cheminée de la salle, mettant fin aux tourments du traître et à son existence.

« Dîtes-vous que cela n'est rien en comparaison de ce que je vous réserve si vous me décevez encore. »

Sans un regard de plus pour le Clan, Alessandro tourna les talons, faisant de nouveau signe à Nerea de le suivre. La jeune fille lui obéit l'esprit encore brumeux par le spectacle auquel elle venait d'assister. Elle avançait derrière l'Ancien comme une poupée sans vraiment s'apercevoir du lieu où il la menait …... sa chambre ….. dans laquelle se tenait un Vampire qu'elle identifia comme un des Anciens du Clan, un des rares à oser se dresser contre leur ancien dirigeant. Restant dans un coin obscur elle n'écouta pas les propos des deux Immortels qui discutaient de la prise en main du clan et autres choses politiques. Non, son esprit était tourné vers cette nuit et ses évènements. Même si elle avait souhaité la mort du bourreau de sa sœur tout était allé un peu trop vite pour elle et la Mortelle avait toujours du mal à intégrer le fait que ce Vampire ne pourrait plus jamais lui faire du mal, que cette période venait de prendre fin devant ses yeux.

« Nerea …. »

Elle releva la tête pour tomber sur le regard hypnotisant de l'Ancien.

« Approche. »

S'exécutant, elle prit place à ses pieds sur un coussin de soie, impatiente de connaître la suite et paradoxalement anxieuse de ce que pourrait être cet avenir. Elle sentait sur elle le regard inquisiteur du Volturri et n'osait bouger, à peine respirer, sursautant même lorsqu'une main glacée lui saisit le menton pour l'obliger à tourner son regard vers le Vampire.

« Dis moi tout. »

Nerea ouvrit la bouche, avant de la refermer. Tout lui dire…Elle voulait bien ... Mais par quoi commencer …Par où commencer …

Par le debut...

Comme obéissant à cette pensée...;mais en étais ce réellement une ?; un flot de souvenirs qu’elle croyais emportés à jamais dans le temps vinrent l'assaillir.
Nayeve et elle, deux orphelines jouant dans les rues sales. Cette main pale qui avait saisit les mèches de sa sœur alors qu’elle tentait de soustraire quelques écus. Le coup violent qui l'avait faite sombrer quand elle même avait voulu voler au secours de sa sœur prise sur le fait. Et son réveil dans une des magnifiques pièces de ce palais.
« N'ayez pas peur, leur avait dit le Maitre.
Je vais vous offrir ce dont vous n'avez jamais osé rêver... Et même plus, mes enfants. »
Elles y avaient cru.
A la faim avaient succédé les plats succulents, les bains parfumés, les étoffes précieuses.
Mes joyaux les appelait-il tandis que jour après jour, tel un orfèvre, il polissait leur apparence et leur esprit. Elles ne quittaient jamais le palais et ses mœurs étranges. Ou du moins, qui aurait du leur sembler étranges. Mais elles étaient si jeunes qu’elles avaient accepté sans sourciller le fait que les plus beaux hommes et les plus belles femmes se laissaient embrasser et offraient le nectar vermeil aux grands du palais. C'était même là un grand honneur et les deux petites ne doutaient pas qu'un jour, elles , les « joyaux » seraient les plus brillantes d'entre eux.

Elles touchaient à leur quinzième printemps quand Nayeve tomba malade. Tout d'un coup, sans qu'un quelconque signe ne prévienne, elle avait du être alitée et s'était mise a dépérir. Et bientôt, un linceul quitta le palais. Nerea n'avait pas pu pleurer. Quelque chose en elle refusait d'accepter cette vérité.
Le maître se mis a veiller sur elle plus encore. Paradoxalement, elle lisait dans son regard une étincelle de contentement qui lui avait fait défaut jusqu'alors. Au contraire, peu importait combien il les choyait, elle avait pris la pleine mesure de la concupiscence et de la frustration quand il posait ses yeux sur elles. Trop jeunes, pas encore prêtes. Elle l'entendait parfois le soupirer.
Comment s'était elle retrouvé devant la porte de la chambre du maître ? Elle ne savait pas exactement. L'instinct, une voix … Le fait était qu'elle avait crocheté la serrure comme ses jeunes années lui avait appris a le faire pour rester tétanisée sur le seuil.

« Petit rat impudent... »
La voix était mortellement glacée derrière elle tandis que ses yeux ne pouvaient se détacher du spectacle de son double enchainé au mur.
A partir de ce jour, le masque du Maitre était fissuré pour de bon. Et si les courtisans étaient encore dupe, elle avait compris que plus que sa nature immortelle, son âme elle était celle d'un monstre. Pourtant elle veillait à le contenter autant que faire ce peux. Car elle savait que le courroux ne viendrais pas sur elle mais sur celle dont le destin désormais était de satisfaire ses plus affreux désirs.

Elles étaient impuissantes. Prisonnières de cette cage dorée. Elles périraient ici sans jamais avoir rien vu du monde ou de la vie.
Hormis la haine. Et l'espoir qu'un jour peut être, Dieu voudrait bien envoyer ses archanges vengeurs sur le monstre.
En fait d'Archange, c'était un tout autre dieu qui lui était apparu, comme ces dieux païens tenant foudre et tempêtes dans leurs mains.
Elle avait depuis longtemps assimilé la cour vampirique et certaines des subtilités de ces êtres. Après tout, c'était leurs mains qui l'avait façonné.
Aussi quand Nayeve lui chuchota que le Maitre projetait de se débarrasser de l'Ancien, elle n'avait pu se retenir d'un sentiment de révolte et de mépris supplémentaire, comme si la tour de la prétention contre nature tentait a nouveau de s'élever sous ses yeux.
Non... Les choses ne devaient pas se passer comme ça. Elle ne les laisseraient pas se passer comme ça. Peu importait qu'elle n'ai ni pouvoir ni puissance, qu'elle soit un simple objet au bon vouloir du Maitre.
Cet ultime affront à l'ordre des choses venait de lui faire voir quel cloporte immonde tenait le pouvoir entre ses mains … Un cloporte qu'elle se devait de faire écraser à défaut de pouvoir le faire elle même, et à n'importe quel prix...

Nerea sursauta, reprenant conscience du regard qu'elle n'avait pas quitté et qui semblait lire en elle comme dans un livre ouvert. Sa main n'avait pas quitté son menton et elle se rendait compte avec désarroi qu'elle n'aspirait qu'à se perdre complètement dans les iris qui la sondaient.
Un autre pouvoir de l'Ancien ? Avait-il celui de ravir les âmes quand on posait le regard sur lui? Elle commençait à le croire...

« Je ne suis pas un Ancien parmi tant d'autres … Je suis celui qui porte sur ses épaules notre race. »

Cela avait été dit sans vantardise, comme un constat pour permettre à la jeune Mortelle de comprendre la conséquence de son geste qui avait mené à ce qu'elle soit ici à cet instant. Elle avait sauvé, en tout cas tenté de ses maigres moyens, le plus vieux des Vampires, celui qui commandait à tous … La poigne du Volturri sur son menton, se fit plus tendre, caressante alors qu'un sourire franc vint s'épanouir sur ses lèvres pâles.

« Même parmi ceux de ma race, il y a peu de gens qui auraient agi comme toi … Finalement ce voyage ne sera peut-être pas une perte de temps. Que penses-tu de l'Immortalité des Vampires ?e

Retirant sa main, Alessandro se laissa glisser à terre pour être au même niveau que Nerea mais même là, il dominait la jeune mortelle qui le regardait avec respect. Son visage se rapprochait de la Mortelle qui se tendit de se sentir si proche du corps puissant, mais il dévia pour venir frôler son oreille de ses lèvres

« Voudrais-tu être l'une d'entre nous, ma fille ? »

Sa fille ? C'était donc ainsi qu'il voulait la remercier, lui offrir son sang, son héritage …. l'Immortalité comme récompense.
La tête lui tournait et ce n'était pas la proximité de l'ancien qui l'aidait à reprendre en main le chaos crée par ses mots. L’Immortalité... Elle l'avait sous les yeux depuis son plus jeune âge... Elle en avait vu les contraintes comme les avantages... Mais au delà de cela...

Le souffle de Nayeve était si faible, chaque inspiration qui soulevait sa poitrine générait un tressaillement de douleur tandis que Nerea luttait pour contenir ses larmes.
« Un jour nous nous enfuirons, lui susurrait-elle, alors je t'en prie, tiens bon. Je te promets que je t’enlèverais de ses griffes... Et nous irons au dehors, nous vivrons heureuses... Ton cauchemar prendra fin, je te promet, encore un peu de courage. »
Elle savait pertinemment qu'elle ne pouvait convaincre sa sœur quand elle même n'y croyais pas. Mais devait elle laisser la résignation qu'elle lisait dans ses yeux si semblables aux siens l'emporter ?
« Il n'y a rien … pour nous ...au dehors … Nerea... Nous le savons... toutes deux.
Ne dis …
Nerea, écoutes moi... Je vais mourir... De mes blessures... Ou de sa main... Ne proteste pas, nous le savons aussi... Ne fait rien de fou. Préserve toi juste toi-même. C'est tout ce que je souhaites. Fait de ton mieux pour vivre... Pour nous deux. Pour que je repose en paix. Pour que je vive a travers toi... Nous ne sommes qu'une Nerea. Toi et moi... Tant qu'une de nous sera en vie, nous le serons toutes deux. »

Elle avait acquiescé les yeux humides. Que faire d'autre. Tout plutôt que de voir les ombres continuer à hanter le regard de sa jumelle martyrisée.

« Oui, je le veux … » s'entendit-elle répondre dans un souffle.

Oui, elle le voulait. Du plus profond d'elle même. L'immortalité... Pour elles deux... Pour que Nayeve ne disparaisse jamais.
Des perles cristallines sillonnèrent ses joues, silencieuses, à la fois douloureuses, à la fois soulagées, mais enfin libérées. Elles naissaient pour Nayeve mais aussi pour elle même.

Venise... La ville qui avait eu la faveur du grand Volturri. Elle n'avait jamais plus vu son Sire depuis cette nuit qui l'avait vu naître. Pour un peu, elle se sentirait presque comme ces enfants impatients qui se languissent dans les dernières heures d'attente.
Le reverrait-elle? Assurément. Le chef de clan lui avait confié une missive précieuse, dont elle même ignorait la contenance et qu’elle n'avait pas chercher à percer.
Enfin ceci n'était que partiellement vrai. Elle avait déduit de ses observations la teneur globale du pli confidentiel.
Le regard fixé sur elle finit par devenir dérangeant. L'humain se faisait trop insistant et dérangeait ses retrouvailles mentales avec l'Ancien.
Serait-il satisfait en la voyant ? Elle avait consacré chaque nuit de sa naissance a parfaire ce qu'elle était, à tenter de devenir ce joyau qui seul pouvait être digne de son Sire. Y était elle parvenue ? Non, seule la perfection pouvait être digne d'Alessandro Volturi et elle ne l'avait pas encore atteinte. Mais elle continuerais d'y consacrer chaque nuit de son éternité...

Un sourire mutin, un regard appuyé, et l'humain lui emboita le pas.
On le retrouva bien plus tard, la nuque brisée. Il ne faisait pas même un repas convenable...