Venise, durant la nuit dernière : Il en avait marre de marcher. Cela faisait presque une semaine, qu’ils n’avaient fait que ça, marcher sous le regard de Dame Lune, passant les jours sagement bien enchaînés pour ne pas disparaître pendant le sommeil de leurs si charmants geôliers. Mais il n’y aurait pas songé ou plus exactement, il n’y songeait plus, profitant de ce répit pour récupérer des longues nuits passées à devoir rallier Venise. Un plan qui ne plaisait pas du tout au lycan. Mais il n’avait malheureusement pas le moindre mot à dire au chapitre. Il avait perdu leur droit en même temps que leur liberté, quelques semaines plus tôt…
Saddata, ville limitrophe avec l’Autriche, région de Vénétie, il y a deux semaines : La nuit était tombée depuis peu, à peine depuis une heure. Mais aucun des cinq membres de la petite meute ne pouvait s’arrêter de courir. Pour les plus anciens, ce n’était pas la première fois qu’il croisait des vampires, encore moins que ça virait à la chasse-poursuite dans les bois et les montagnes. Mais pour Innocenzo, ce qui se passait était nouveau et affreusement dérangeant. Il avait senti le regard prédateur des deux poursuivants quand leurs regards s’étaient posé sur la meute. Et depuis cette rencontre, quinze minutes plus tôt, ils fuyaient à travers les bois. Il avait juste eu le temps de saisir le « Chiava il santo (2) » de Lorenzo, avant qu’il marmonne l’ordre de décamper. Et Lorenzo ne jurait jamais ! C’était bien ce qui l’avait poussé à obéir sans poser la moindre question. Si l’alpha avait donné cet ordre, c’était qu’il avait une raison. D’ordinaire, ils massacraient les vampires qui venaient sur leur terre. Mais pourquoi fuyaient-ils ?
« Lorenzo, une autre idée digne de ton rang ? » pesta Solena, la seule fille du groupe. Du haut de ses quinze ans d’apparence, elle avait acquis la place de bêta dans la petite meute, et ce bien qu’elle soit la plus jeune en âge réelle. Mais elle faisait aussi des plus anciens, même si son ancienneté se comptait en deux années. Ils étaient tous encore des enfants, pour leurs congénères, même s’il n’en avait croisé aucun. Sauf Lorenzo, qui avait bien connu son créateur, enfin si un an et demi pouvait permettre d’apprendre à bien connaitre quelqu’un. Mais cela lui avait permis de savoir les choses essentielles dans une vie de lycans, en particulier les amis et ennemis qu’il y avait. Et Lorenzo avait rabâché constamment qu’il fallait se méfier des Vampires. Qu’il n’y avait aucune vie, avec ces êtres, juste la mort, et encore c’était pour les plus chanceux.
« Hormis tenir jusqu’au matin ? » Le ton de l’alpha laissait clairement percevoir l’agacement de la situation. Il n’avait pas été prudent, il avait mis sa meute en danger… Et pas qu’un peu. Et les six heures qui les séparaient du lever du soleil ne leur permettrait pas de mettre une distance raisonnable entre eux et les vampires. Ils auraient pu s’attaquer à eux, mais il savait parfaitement que cela impliquerait des pertes, et il refusait de provoquer cela… Non, pour la première fois depuis longtemps, il se sentait totalement incapable de protéger sa meute.
« Idée stupide, mais… on est cinq… Si on se sépare, ils ne pourront pas nous suivre tous… » marmonna le dernier né. Il n’aimait pas du tout l’idée de séparer la meute, mais si être ensemble ne leur permettrait pas de remporter une victoire, il valait mieux qu’ils se séparent. Même si cela voulait dire qu’il y aurait des pertes… Il y aurait forcément des pertes s’il continuait à courir ainsi. Ils finiraient par se fatiguer, et les Vampires n’auraient plus qu’à les cueillir… L’une comme l’autre des solutions n’était pas plaisante. Il y aurait forcément des répercussions.
« Je déteste ton idée, Innocenzo, mais c’est la seule potable. A Tierce(3) et pas avant, à la maison. » Fut la dernière fois qu’il entendit la voix de l’alpha, avant qu’ils se séparent tous. Il n’avait que peu de chance de s’en tirer indemne de cette nuit… Et aucun doute que ceux, qui s’en tireraient vivants et hors des griffes des vampires, seraient quitte pour une bonne leçon. Chacun parti dans une direction, laissant les vampires se départager les cibles. L’un partit à la suite de Lorenzo, l’autre à la suite de Solena. Tout au moins, c’est ce que cru percevoir le jeune lycan, qui n’arrêta sa course qu’après une bonne quinzaine de minutes. Reprenant son souffle, le jeune Italien continua à marcher, s’éloignant toujours, enfin, il l’espérait.
Le silence, le calme… Presque aucun bruit ne troublait la forêt. Parfois, un hululement de chouette ou de hibou rompait le silence. Mais sinon, aucun bruit ne s’élevait. A la réflexion, il n’aurait peut-être pas du lancer cette idée de se séparer… Et Lorenzo n’aurait jamais dû accepter… C’était encore plus stressant avec ce silence qu’en course poursuite. Tout pouvait se passer et l’imaginaire fertile devenait vite une limite pour les nerfs de n’importe qui. Non, il n’aimait pas cette solitude dans ces bois. Il imaginait bien trop de choses pour pouvoir être serein. Et la panique ne mènerait nulle part. Pourquoi cet idiot sans cervelle d’alpha avait écouté son idée ? Surement parce qu’il n’y en avait aucune de mieux… Restait plus qu’à trouver une cachette pour la nuit… A condition qu’elle puisse masquer son odeur… Ce qui n’était pas dit…
Le temps passait, pas de bruit, rien d’autre que sa propre respiration. Il s’était trouvé un coin en hauteur, qui lui permettait de voir si quelqu’un d’autre arrivait. Un bruit de tir, un hurlement qu’il reconnaissait… trop… celui de son alpha. C’était mauvais signe… Très mauvais signe s’il avait trouvé Lorenzo. Il avait envie d’aller voir, de savoir ce qui se passait, mais ce ne serait que se jeter dans la gueule du loup… Et ce loup-là n’avait strictement rien de gentil et doux… C’était plutôt le loup coriace et cruel aux instincts de chasseurs. Des hiboux et des chouettes s’envolèrent, faisant écho aux cris du jeune homme, avant que retombe un silence de mort sur la forêt. Mais rester sagement assis à attendre qu’ils viennent le débusquer ne le tentait pas. Aller vers son créateur serait suicidaire, car non seulement il leur donnerait son ancienne piste, mais à coup sûr ils seraient encore dans le coin… et ses connaissances de soigneur ne seraient d’aucune utilité… Il ne pourrait pas s’approcher de lui, sans se retrouver trop proches des vampires. Non, mauvaise idée…
Rage, désarroi, colère… Que faire, quand on savait que le moindre acte pouvait n’avoir que des conséquences dramatiques… Même son immobilité l’était. Tirant machinalement sur sa chemise, il entreprit d’essayer de clarifier son esprit. Il ne fallait pas qu’il laisse son esprit s’embrumer devant l’évolution catastrophique de la situation. Laissant sa main se poser sur son pendentif, le lycan retint un soupir. Il n’avait strictement aucune idée de ce qu’il devait faire. Le tintement métallique de son porte-bonheur lui poserait problème si jamais il croisait les vampires. Mais il n’avait aucune envie de s’en séparer. C’était le seul bibelot qu’il avait conservé de sa vie humaine. Ca et des talents d’herboriste-guérisseur.
Son regard perdu sur le collier, jouant machinalement avec, il perçut à peine la présence qui le rejoignait. A moins qu’il n’ait aucune envie de bouger, de reprendre cette course, dont il n’avait aucune chance de sortir vainqueur. Si Lorenzo avait refusé le combat, c’était que même eux cinq ensemble, il n’aurait pas vaincu les deux vampires. A croire que depuis la rencontre, la conclusion était inévitable. Combien d’entre eux survivraient à cette nuit ? Lorenzo était déjà capturé et s’ils avaient utilisé des balles d’argent, il devait être dans un mauvais état, à moins qu’ils n’usent de leur sang, sans lui laisser le choix. Sinon, il en mourrait, ce qui ne lui déplairait pas. Il n’aurait jamais pu supporter une vie sous le joug d’un autre. Solena... Elle devait avoir réussi à échapper aux griffes de son poursuivant, vu son ingéniosité. Quant aux jumeaux, il ignorait où ils étaient, mais Angelo ne laisserait pas les vampires emmener Amadeo sans chercher à le protéger. Ils se protégeaient constamment, c’était amusant à observer. La moindre remarque vexant pour l’un, et c’était l’autre qui sortait de ses gongs. Ce serait bien qu’ils arrivent à échapper aux mailles du filet. Il ne pouvait plus leur souhaiter autre chose.
Détachant son regard et sa main de son bijou, le lycan posa son regard sur le vampire qui se trouvait quelques mètres en contre-bas. Evaluant du regard le vampire qui se tenait là, il planta son regard azuré dans celui, marron, de son adversaire. Il y avait la solution de facilité, celle de se laisser prendre sans se débattre, de passer dans le style gentil soumis qui ne proteste pas… Et la solution on ne peut plus douloureuse de ne pas se laisser faire. Et il savait parfaitement que quitte à se faire avoir, autant que ce soit avec style et sans se laisser faire. Repoussant sa besace sur le côté, l’herboriste retint un soupir d’agacement. Il n’avait aucune idée s’il trouverait un moyen de s’en sortir…
« Viens donc me chercher, si tu m’veux… » murmura d’un ton à peine audible le lycan. Il ne doutait pas une seconde que le vampire l’avait entendu. Il ne douta pas une seconde de l’issue du combat. Il n’avait pas assez de connaissances dans les vampires pour réussir à le blesser suffisamment… Il devait juste prier sur le fait qu’il pouvait exaspérer aussi bien Lorenzo qu’un vampire avec son caractère. Peut-être que dans ce cas-là, il pourrait s’en sortir. Laissant le vampire lancer la première offensive, le lycan se baissa rapidement, esquivant son coup au visage, pour riposter par une balayette, tout en glissant sa main dans son sac, pour récupérer ses fioles. Il ignorait totalement si les vampires pouvaient souffrir face à des poisons cutanés… Mais s’il ne tentait rien, il ne gagnerait pas. Il savait parfaitement que si le combat s’éternisait, il serait en grande difficulté.
Réussissant à saisir une des fioles de soins un peu trop concentré quand il l’avait fait, il espéra que la dose de laurier rose serait suffisamment dérangeante pour déconcentré son adversaire. Il n’espérait pas le tuer, juste l’incommoder quelques secondes, pour en profiter. Aussi brisa-t-il sa fiole sur le visage du vampire, tout en continuant à esquiver, encaisser ou riposter à ses attaques. Mais contrairement à son espoir, ce ne fut qu’un rire moqueur qui s’éleva de la gorge du vampire et un juron qui s’échappa de ses lèvres. Il était vraiment mal…
« Que croyais-tu, lycan ? Que ces trucs d’humains marcheraient ? Pauvre petit inconscient… » susurra la voix profonde et clairement moqueuse et amusée du vampire, avant de reprendre ses attaques, rapides, précises sur Innocenzo, qui recommença à esquiver, bloquer et attaquer par moment, mais il sentait bien ses attaques et sa défense faiblirent… il ne fallut pas très longtemps au vampire pour percer sa défense et l’assaillir d’une série de coups qui le firent plier. Il se retrouva rapidement bloquer sous le vampire et malgré toute sa bonne volonté pour récupérer sa liberté, il n’arrivait à rien. Un grognement s’échappa de ses lèvres.
« Je te déconseille de mordre, lycan. Si je me pousse, te soumettras-tu où dois-je t’assommer pour t’emmener avec l’autre cadavre ? »
« J’sais encore me tenir » souffla le lycan, notant pourtant la remarque du vampire. Il ne doutait pas une seule seconde qu’il parlait de son alpha. Laissant le vampire se relever, il se redressa aussi, retenant une grimace de douleurs. Aucun doute qu’il devait avoir une collection impressionnante de bleus et autres blessures sur son corps. Mais il y survivrait… Comme souvent, maintenant. Sans la moindre protestation, il se laissa mener par son geôlier. Il n’aurait pas eu la force de se lancer dans un autre combat. Mais l’idée de se retrouver sous la garde de vampires ne l’attirait pas… Absolument pas. Déjà qu’il supportait mal les ordres de Lorenzo, il ne supporterait pas ceux des enfants de la nuit. Mais il verrait ça quand le problème se poserait. Pour l’instant, il se laissait mener par la poigne de fer du vampire.
« Je te déconseille de fuir… Il n’est pas très patient ! » Un regard vers le second vampire qui était assis aux côtés de son alpha et le regard noir de ce second vampire aurait calmé les envies de n’importe qui. Mais ce ne fut que des yeux levés au ciel devant la stupidité de la remarque, qui eurent raison de l’agacement du second vampire. Vu sa tenue, le combat contre Lorenzo avait été acharné. Et son alpha l’avait touché à plusieurs reprises. Son état expliquait surement qu’il ait fini par sortir son arme et qu’il soit un peu sur les nerfs…
Se laissant mener aux deux autres, le lycan laissa son regard se poser sur son alpha, qui vivait encore… pour l’instant… Mais vu son visage et le sang qui coulait de la blessure, il n’était pas partant pour une promenade de santé. La balle devait être en argent, pour qu’il souffre autant. Sinon, elle le dérangerait, mais pas autant. Il était lentement en train de se faire empoisonner. Au moins, il n’aurait pas à voir la fin de sa meute. Ni à supporter la privation de liberté qui planait sur eux. Il n’avait plus qu’à espérer que les autres puissent s’échapper…
Voyant le second vampire se relever pour s’approcher d’eux, il laissa son regard se poser sur l’alpha de cette meute. Ils auraient pu le sauver, mais le temps de le faire et d’aller se cacher des rayons du soleil, ce dernier se serait levé… Esquissant un sourire malsain, il se pencha néanmoins sur le lycan, retirant la balle d’argent et laissant quelques gouttes de son sang sur la blessure… Ce ne serait que partie remise… Il le traquerait et le trouverait rapidement… Mais pour l’instant, il le laissait hurler sous la douleur. Son regard se posant sur le lycan encore valide et sur son frère de sang, il s’éloigna pour retourner vers leur logement, emmenant un captif. Ils retourneraient traquer les quatre autres le lendemain soir…
Saddata, deux jours après sa capture :Innocenzo souriait, trahissant un amusement évident. Les deux vampires s’acharnaient toutes les nuits pour retrouve le reste de sa meute, mais même les hurlements de douleur de son alpha ne suffisaient pas à les mener aux quatre fugitifs. Ils avaient su se trouver une bonne cachette… ou suffisamment bâillonner leur alpha pour que ses plaintes ne les y mènent pas. En tout cas, ce constat avait agacé les deux vampires, qui pensaient trouver rapidement les derniers membres de cette meute, mais ils devaient se contenter d’un lycan qui les regardait avec soulagement et moquerie. Malgré son caractère agaçant, il aimait bien sa meute, ce groupe de gamins qui cherchaient à trouver leur place dans ce monde. Alors oui, il retrouvait son côté agaçant, juste pour qu’ils recherchent moins sa meute, qu’ils ne les trouvent pas.
« Tu devrais arrêter de sourire, lycan… ou je pourrais t’apprendre où est ta place. »
Le sourire méprisant s’élargit, devant la remarque fade et stupide du vampire qui l’avait battu. Il ne doutait pas une seconde de ses paroles, ce ne serait qu’une fois de plus où ils le frapperaient, pour son sourire moqueur, pour ne pas répondre à leur questions sur les lieux de fuite possibles de sa meute. Comme s’il avait la moindre idée d’où il avait pu aller. S’ils avaient pu, ils avaient dû commencer par fuir la région, mais Lorenzo n’était surement pas en état pour un long voyage. Ils devaient surement s’être abrités dans les montagnes, ils y trouveraient des grottes pour les abriter des deux chasseurs.
Saddata, quatre jours après sa capture :Un coup de pied dans l’estomac du lycan pour le réveiller, un grognement comme unique réponse, mais les yeux azurés qui s’ouvraient lentement, pour ne pas s’en prendre encore un. La mauvaise humeur des deux vampires empirait quand le temps passait. Ils ne trouvaient pas les fugitifs et le sourire narquois du seul lycanthrope qu’ils avaient eu les agaçait profondément. Plus pour ne plus voir son sourire moqueur, il avait décidé d’aller sur Venise, pour le revendre. Ils l’auraient bien gardé, mais ils sentaient que ce le rouquin serait juste toujours aussi insupportable. Et ils ne pouvaient pas l’emmener quand ils traquaient leur proie, sans quoi il aiderait les fugitifs sans le moindre remord, s’il n’en profitait pas pour s’échapper, maintenant qu’il avait repris ses forces.
« Debout, on déménage ! »
Se relevant en retenant à peine un soupir de lassitude, Innocenzo les regarda toujours aussi méprisant. Il savait parfaitement ce qui l’attendait, les deux vampires n’avaient pas été très discrets, en en parlant dans leur pièce. Lui logeait dans une minuscule pièce, qui devait servir de rangement plus que de pièces pour vivre. Mais comme elle n’avait qu’une entrée, qui donnait dans la pièce où vivaient les deux vampires, ils avaient la certitude que s’il essayait de fuir en pleine nuit, celui qui restait le verrait.
« J’espère au moins que Venise est une belle ville… » marmonna-t-il, en les suivant…
Retour à l’arrivée d’Innocenzo à Venise :Retenant un soupir de lassitude, le jeune lycan ne put retenir un soupir de soulagement, quand il vit la ville de Venise. S’il avait fallu encore passer une nuit dans un cagibi et se faire réveiller aussi aimablement par les deux chasseurs, il serait devenu mordant. Surtout qu’il commençait à en avoir assez de devoir passer la nuit à marcher après un réveil aussi agréable. Surtout que ces idiots lui servaient à peine à manger, et rarement autre chose que des légumes. Bref, même s’il savait que Venise serait pire dans un certain sens, il espérait au moins qu’il mangerait autre chose que des trucs vers. C’était pas un lapin, contrairement à l’avis de ces idiots.
Se laissant sagement guider, le jeune lycan ne broncha pas, quand ils le firent entrer dans un magasin à la devanture un peu miteuse. Son regard azuré se posa dans la pièce, regardant le vieillard d’une quarantaine d’années qui l’observait minutieusement. Lui adressant son sourire toujours aussi méprisant, l’Italien savait parfaitement que son trajet s’arrêterait ici pour l’instant… Et quitte à être agaçant, autant s’assurer que les chasseurs repartent avec le moins de sous possibles. Déjà que le regard du plus âgé avait le don de l’agacer, surtout par son observation minutieuse. Il savait parfaitement qu’il essayait d’estimer un prix… Comme si les gens se payaient… Les vampires n’étaient que des idiots. Les trois vampires se mirent rapidement à parler, en l’oubliant dans un coin, même s’ils devaient inconsciemment y faire attention, pour qu’il ne parte pas du magasin.
Sadatta, trois mois plus tôt :Depuis toujours, sa maison était une petite demeure à proximité de la ville de Sadatta, sans pour autant être en faire partie. Il y vivait tranquillement, avec sa mère, sous le regard méprisant des villageois. Ces derniers ne les aimaient pas, ils les toléraient seulement. Enfant, Innocenzo les avait haï, méprisé et détesté. Pour ce comportement méprisable. Ils les toléraient, mais n’hésitait pourtant pas à leur demandé de venir en plein hiver, quand un enfant était malade. Mais en dehors, leur présence dans le village dérangeait profondément. Enfant, il n’avait pas compris, il ne comprenait pas que sa mère accepte ce traitement, sans protesté. Pas plus qu’il n’acceptait leur comportement quand ils le voyaient. Ils y avaient quelque chose dans leurs regards qui l’avaient toujours effrayé. Une peur, une inquiétude qui disait clairement qu’il ne l’aimait pas. Il se rappelait bien avoir pleuré plus d’une fois dans les bras de sa mère, quand il entendait leurs remarques blessantes.
« Maman ? J’y vais… Je rentrerais avant la nuit. »
« Sois prudent, Innocenzo. »
Quittant la petite maison où ils vivaient tous les deux, le jeune humain partit d’un pas serein vers la forêt. Sa mère lui avait demandé de lui ramener des plantes médicinales, pour qu’elle puisse refaire certaines de ses préparations. Et vu qu’il l’avait un nombre incalculable de fois, il les connaissait par cœur. Cela faisait maintenant quelques années qu’elle lui demandait ce service. Surtout maintenant qu’elle avait du mal à marcher. Et le jeune adulte ne se refusait jamais, il aimait bien se promener dans les bois, même si sa mère rouspétait pour son inconscience à y rester parfois trop tard pour qu’il rentre avant la tombée de la nuit. Mais elle ignorait qu’elle ne reverrait plus son petit.
Rejoignant rapidement la forêt, le jeune herboriste entreprit tranquillement sa quête de plantes, ne prêtant qu’une attention partielle au monde environnant. Il y avait bien des animaux sauvages, mais jusqu’à maintenant, il n’y en avait pas eu de très dangereux. Même si dernièrement, il y avait des rumeurs sur une meute de loups qui ne devait pas être loin, puisqu’on pouvait l’entendre. Les bergers se désolaient de la perte de certains moutons, faisant qu’ils avaient redoublé de prudence et la rumeur de la meute de loups avaient rapidement fait le tour du village, et même eux avait été prévenu. Mais ce qui était étonnant venait des heures d’attaques. Nul n’avait vu le moindre loup durant la journée… A croire qu’il avait su cacher correctement. Surtout qu’elle avait lieu rarement… Les dernières dataient de presque une lune plus tôt. Mais comme les moutons disparaissaient encore, personne n’y avait fait très attention.
La journée se passait, lentement, calmement. Quelques rares oiseaux chantaient, et le bruissement du vent dans les arbres ne le dérangeait pas particulièrement. Il ignorait ce regard qui était posé sur lui, l’observant et le suivant dans ses moindres faits et gestes. Il ignorait qu’Amadeo l’avait trouvé trop proche du territoire de la meute et qu’il l’observait pour s’assurer qu’il ne s’en approchait pas. Il fallait surtout espérer que l’humain soit reparti à la tombée de la nuit. Etrange qu’il vienne jusqu’ici, ils n’avaient vu personne depuis qu’ils s’étaient installés dans les montagnes. Le village le plus proche était suffisamment loin pour qu’ils n’y viennent pas en pleine nuit… Etrange qu’il arrive jusqu’ici… D’où venait-il ?
Assis à l’ombre des arbres, les pieds dans le ruisseau, l’herboriste ramena son sac sur ses genoux, observant le contenu, pour s’assurer avoir récupéré ce que lui demandait sa mère. Mais aussi récupérer d’autres plantes qui pourraient manquer à l’avenir. Et même s’il aimait bien la nature, il n’avait pas envie de se trouver en rupture de feuilles de laurier ou d’autres herbes en plein hiver. Ils y en auraient à peine dans les bois, et ce serait encore plus complexe d’en trouver. Avec un sourire amusé en constatant qu’il lui manquerait encore quelques plantes avant de pouvoir rentrer, il sortit son repas de midi, composé de pain et fruits. Il avait encore quelques heures dans la forêt avant de pouvoir retourner aux côtés de sa mère. Normalement, il n’aurait aucun problème à trouver ce qui lui manquait, il serait rentré avant la tombée de la nuit.
Profitant de quelques minutes de répit, le jeune humain n’avait pas envisagé ne serait-ce qu’une seconde qu’en se relevant et repartant à sa quête, il serait classifié comme un danger non plus potentiel, mais un danger complet, puisqu’il s’était approchait encore de leur grotte, de leur refuge. Mais ce n’était absolument pas volontaire, il savait qu’il y avait des plans d’aconits et de belladones, dont il aurait besoin. Non, pas une seconde il ne s’était attendu à sentir un poids se poser sur ses épaules, le laissant se cogner brutalement contre le sol, rejoignant ainsi rapidement une inconscience salvatrice.
Depuis une quinzaine de minutes, Lorenzo incendiait Amadeo et son idée stupidement dangereuse.
|| Quelle idée il avait eu d’assommer cet humain, avant de paniquer au bout de quelques instants parce qu’il ignorait quoi faire. Il avait attendu sagement qu’il pensait que l’humain se réveillerait de lui-même, une dizaine de minutes après. Seulement… Ce n’était pas arrivé et il avait fini par aller voir Lorenzo… Qui lui hurlait dessus depuis,
|| car s’il avait réfléchi un instant, il n’aurait pas sur les bras un humain, inconscient, qui n’aurait rien d’humain le lendemain. Même s’il courait aussi vite qu’il le voulait, il n’aurait pas le temps d’échapper à leurs crocs. Et depuis qu’il l’avait fait remarquer aux trois autres, ils en avaient parfaitement tous consciences, sauf l’humain, puisqu’il n’avait rien entendu du discours de l’alpha. Ce n’était pas plus mal… Restait plus qu’à savoir comment lui expliquer les choses, suite à cette stupidité. A moins qu’il ne se réveille pas avant l’arrivée de la nuit. Ce serait surement la meilleure chose pour la meute, mais aucun doute que l’humain n’apprécierait moins… En même temps, il n’avait aucune chance d’y échapper…
« Espèce d’idiot ! Et on fait quoi de lui maintenant ? La nuit va tomber dans deux heures, il ne nous échappera pas ! »
Lorenzo avait beau cherché, il n’y avait aucune solution pour épargner l’humain… La seule chose qu’il devait maintenant craindre, c’était sa réaction. Qui n’aurait aucune raison d’être calme et sereine. Qui serait calme et serein en apprenant que non content de ne plus être humain, il ne pourrait plus rentrer chez lui… plus jamais, sans peine de mettre ceux qu’il aime en danger… Non, cet humain n’avait pas de raison d’accepter son futur avec un sourire radieux… Mais il n’imaginait pas qu’un humain pouvait être aussi rageur, il n’imaginait pas que la fragilité d’un humain pouvait n’avoir aucun impact, mais il le comprit avec surprise quand non seulement il lui annonça la mauvaise nouvelle, mais le plus choquant pour l’ensemble des lycans avant été de voir l’humain giflé Amadeo avec une force humaine et donc relativement peu dangereuse pour un lycan. Mais vu son caractère, aucun doute que la suite serait… prometteuse…
- Spoiler:
(2) Juron italien
(3) Office religieux qui avait lieu vers 9h du matin.